Comprendre la situation à Lampedusa : combien de personnes arrivent vraiment et quel est leur profil ?
Équipe plaidoyer de France terre d'asile - Publié le 5 octobre 2023Les images de nombreux bateaux de fortunes arrivant dans le port de Lampedusa la semaine du 11 septembre a fait le tour des médias européens, suscitant des Unes et des prises de positions politiques alarmistes. Pourtant, les deux semaines précédentes, le constat était tout autre. Du 1er au 10 septembre, les autorités italiennes ont enregistré près de six fois moins d’arrivées (1 120) que durant la même période en août et en juillet (respectivement 6 771 et 6 571 débarquements). En effet, les conditions météorologiques avaient limité les départs des côtes libyennes et tunisiennes. Ainsi, les nombreux débarquements qui ont eu lieu entre le 11 et le 14 septembre 2023 (près de 11 200 personnes) traduisent en réalité un effet de rattrapage par rapport au faible nombre d’arrivées au début du mois. Les semaines qui ont suivi ont vu le nombre de débarquements chuter à 5 900 du 15 au 21 septembre, puis à seulement 780 du 22 au 30 septembre.
Source : Ministère de l’Intérieur italien.
Au 30 septembre, près de 134 000 débarquements ont été recensés en Italie depuis le début de l’année, le mois d’août connaissant le plus grand nombre d’arrivées, suivi du mois de juillet. Cette tendance est analogue à celles observées les années précédentes et s’explique par des conditions météorologiques plus clémentes en mer Méditerranée durant les mois d’été. Avec 19 009 débarquements, le mois de septembre 2023 représente près 14 % du total d’arrivées annuelles. En comparaison, les mois de juillet et août représentent respectivement plus de 19 % et 17,5 % de ce total.
Source : Ministère de l’Intérieur italien.
En outre, cet épisode s’inscrit dans un phénomène plus général d’accroissement des arrivées dans l’Union européenne au cours de l’année 2023. Le nombre croissant de traversées ces dernières années trouve son origine dans une reprise des mouvements migratoires après la baisse drastique liée à la pandémie de Covid ainsi que dans des crises géopolitiques de plus en plus nombreuses et dont l’ampleur ne cesse de s’accroître (révolutions, coup d’états, guerres civiles…) dans de nombreux pays de départ (principalement subsahariens), auxquels s’ajoutent des crises politiques et économiques dans des pays de départs et de transits, tels que la Lybie ou la Tunisie, que de plus en plus de nationaux cherchent à fuir.
Principales nationalités des arrivants
De nombreux commentaires circulent au sujet de la nationalité des personnes arrivées à Lampedusa, y compris de la part de représentants politiques français. Toutefois, même si le ministère de l’intérieur italien fournit des statistiques actualisées quotidiennement, la nationalité de près de la moitié des personnes débarquées n’a pas encore été définie.
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Selon les chiffres déjà disponibles, la nationalité la plus représentée est la tunisienne. Frappé par une crise économique depuis plusieurs années, le pays est confronté à une inflation galopante, à des pénuries répétées de produits de base et de médicaments, et à une restriction croissante de certaines libertés civiles, poussant de plus en plus de Tunisiens et Tunisiennes, issus de toutes les classes sociales, à émigrer.
Les Guinéens et les Ivoiriens représentent respectivement près de 12 et 9 % des arrivées à Lampedusa depuis mi-juillet. Au premier semestre 2023, les demandeurs d’asile originaires de ces pays ont bénéficié d’un taux de reconnaissance en première instance à l’échelle européenne de respectivement 33 et 28 % . En France, ces nationalités font partie des cinq premières nationalités à avoir obtenu une protection internationale en 2022. Les principaux motifs de l’asile pour les ressortissants de ces nationalités sont variés : certaines concernent des militants politiques, des journalistes, activistes ou défenseurs des droits de l’homme ; d’autres des victimes de torture, d’esclavage ou de la traite des êtres humains. Les jeunes femmes sont exposées à un risque accru de mariage forcé et de mutilations génitales. Par conséquent, les personnes fuyant ces pays sont de plus en plus nombreuses et leur taux de reconnaissance a significativement augmenté depuis 2017.
Quant aux demandeurs maliens, leur taux de reconnaissance à l’échelle européenne dépassait les 72% en 2022 du fait de la multiplication des attaques terroristes contre les civils ainsi que les conflits entre groupes armés. Fin 2022, le Secrétaire général des Nations unies a fait état d’une situation humanitaire « catastrophique » dans le pays. Les femmes maliennes sont également victimes de violences fréquentes liées à leur genre.
Enfin, bien que cela soit peu médiatisé, plusieurs centaines de Syriens sont arrivés à Lampedusa ces dernières semaines. Beaucoup d’exilés syriens font état d’une dégradation récente de la situation sécuritaire dans leur localité d’origine, en particulier celles contrôlées par le régime. Du fait de la guerre qui sévit dans le pays depuis plus d’une décennie, cette nationalité bénéficie d’un taux de protection de 94 % au niveau européen, le taux plus élevé en 2022.
Taux d’octroi de la protection internationale dans l’UE (2022) des 10 nationalités les plus représentées à Lampedusa ces dernières semaines.
Source : Eurostat
Un nombre non négligeable de personnes arrivant sur les côtes italiennes est susceptible d’obtenir une protection internationale. Depuis de nombreuses années, les profils des personnes arrivant dans l’Union européenne sont complexes et divers. La protection internationale ne se limite pas aux motifs « politiques », et sauf à de très rares occasions, ne s’octroie pas automatiquement en fonction d’une nationalité. La Convention de Genève sur les réfugiés et le droit européen sur l’asile prévoient d’ailleurs bien que toute personne peut demander l’asile, et que l’examen des demandes doit toujours être individuel.